// Caracolito » 2016 » août

Maupiti – Mopelia

Maupiti

ce qu’on nous avait dit de Maupiti la passe pas très large et en zig zag le courant fort dans la passe, c’était vrai mais personne ne nous avait parlé de cette paroi rocheuse au pied duquel se trouve le village, c’est assez impressionnant : le village se situe sur une bande de terre étroite limitée d’un côté par le lagon, de l’autre par la paroi abrupte et nue de la roche, comme si les habitants de l’ile vivaient en permanence adossés à un mur, ou se pourrait il, comme s’ils vivaient au pied du mur ? Car dans cette bande de terre que constitue leur territoire, les villageois cohabitent étroitement avec les morts : des terrains petits et devant les maisons, se trouvent les tombes ; c’est traditionnellement qu’en Polynésie les tombes se situent dans les terrains familiaux, mais du fait de l’étroitesse de la bande de terre, les morts se retrouvent aux portes des maisons. A tel point que le toit en bois peint qui surplombe parfois la tombe sert aussi de support pour aérer les matelas,et d’abri pour la débroussailleuse…

un petit lagon, une bande de terre étroite, une muraille de pierre dans le dos, les morts avec les vivants, c’est ainsi que l’on semble vivre à Maupiti… C’est un petit monde en soi, on a un peu l’impression de vivre en vase clos, du vivant au mort, de ce fait, le passage de la passe, comme une épreuve, avec ses risques d’échouements et de situations critiques par temps mauvais, ressemble à un passage du Styx par Charon, un jour on fait le chemin inverse et on retrouve le libre océan.

 

 

Mopelia du 12/08/2016 au 20/08/2016

Mopelia- Maupiti, les deux îles sont liées car les habitants de Mopelia viennent tous de Maupiti, mais ces deux îles sont exactement l’inverse l’une de l’autre, Mopelia c’est un monde libre, un lagon à perte de vue, une île corallienne sur laquelle une vingtaine d’habitants vivent, ou plutôt organisent chaque jour leur survie et trouvent leur moyens de subsistance dans la nature environnante.C’est la puissance du vivant, l’état de survie avec toute l’intensité et la force que cela implique, le monde végétal et animal par opposition au monde minéral de Maupiti,

 

 

Maupihaa en tahitien, Mopelia en Français, une île inexistante à l’échelle d’une planisphère, inconnue de la marche du monde, invisible aux yeux de tous, et pourtant tellement grande par le monde qu’elle nous révèle, le monde du cœur avec l’accueil et la générosité de Marcello et Adrienne et leurs enfants Fai, Karina et Hio. et le monde puissant de la nature.

Dans la cabane de Hio

Dans la cabane de Hio

Les oiseaux, sternes et fous de Bassan, mouettes, par centaine tournent dans le ciel lorsque nous arrivons à l’approche de l’île, les requins, jusqu’ à 9 requins autour de notre bateau, lorsque nous jetons l’ancre , 20 rémoras éliront leur domicile sous notre coque. , la baleine et son baleineau que nous observons depuis le récif, coquillages, bénitiers , crabes de cocotiers, poissons juvéniles entremêlés au corail…

On y a appris des choses essentielles telles que pêcher avec un Bernard-l’Hermite, faire du feu à la bourre de coco, faire du ipo, chasser le crabe de cocotier.

Ceux qui vivent ici ne possèdent pas beaucoup de choses et pourtant sont à l’abri de tout, leur vie est magnifiée par l’essentiel, chasser, pêcher, cultiver le potager, faire du coprah. Sur la lande de sable, entre lagon et océan, ils ont construit avec des tôles leurs cabanes pour dormir que les enfants s’empressent de visiter, comme des maisons de poupées géantes.

 

 

Hio nous parle de Moitessier et de son expérience sur l’île de Ahe pour planter des graines et faire pousser des plantes dans le sable, Hio plante toutes les graines dont il dispose, « tamata » nous répète il, après Moitessier, il faut essayer. Et ce sont bananes, papayes, pota, vigne, poivrons, salade qui poussent … dans le sable…

Omelettes d’œufs de sternes, thon cru, poulet, plat géant de spaghettis (Elanore m’a dit qu’elle n’en avait jamais vu autant ), nous sommes invités à leurs repas gargantuesques et ne le dites pas, nous nous transformons alors en ogres (mais nous ne mangeons pas les enfants qui lisent ou apprennent à lire les histoires). La veille au soir, nous mangeons dans leur campement au sud de l’île, des bénitiers que nous avons récoltés, qui ont cuits dans du lait de coco au curry dans une grande marmite de sorcière bien noire, posée sur un feu de bourre de coco.

 

 

Nous allons chercher des crabes de cocotiers la nuit à la lampe électrique ; ils ont des pinces énormes, une carapace de gladiateur, une allure préhistorique, ils vivent dans la forêt de cocotiers, et nous les surprenons à la lumière de nos lampes ou bien nous les extirpons de leur trou mais c’est avec traîtrise qu’ils sont pris , attrapés par le dos (à quoi leurs sert donc leurs pinces énormes) ; au campement, ils sont suspendus à des fils, tels des damnés moyenâgeux , avant d’être jetés dans une grande marmite d’eau bouillante.

 

 

Sur le récif, pendant que nous récoltons les coquillages : au loin de l’autre côté du récif, nous observons une baleine et son baleineau, pendant plus d’une heure et au près, dans 50 cm d’eau, des poissons minuscules dans le corail rose.

Pierre comme envoyé des dieux, répare leur installation solaire.

Le soir nous sentons le feu de la bourre de coco sur nous, même revenus au bateau. La vie sauvage nous gagne.

Nous quittons l’île un soir d’inconscience.

 

Raiatea, Tahaa, Bora Bora

Raiatea, Taha’a, Bora Bora du 4 août au 11 août 2016

Je voudrais encore retenir par les mots ce qui s’en va, Tahiti, le poisson échappé de Raiatea., Raiatea le domaine des dieux, qu’abrite la baie d’Opoa, Taha’a, la nudité, qu’un détroit sépare de Raiatea.

 

 

Taha’a, son bleu turquoise se déroule jusqu’à la barrière de corail, son bleu foncé s’étend jusqu’au vert des montagnes, nous passons d’un mètre de profondeur à trente mètres en faisant un écart, un mouvement de la barre, un saut de dauphin, la profondeur se mesure à une nuance de bleu, chez Cézanne, le rouge est ce qui est près, le bleu ce qui est éloigné, pour nous c’est le bleu qui nous sert de repère, qui nous guide et nous porte, le bleu qui devient parfois noir, blanc, vert, rouge, le bleu de la mer, le bleu du ciel.

Le bleu turquoise de Taha ‘a se déroule jusqu’à la barrière de corail d’où surgit la masse noire de Bora Bora, le soir au soleil couchant, le rouge ronge le bleu, puis le noir redessine tous les contours,les pleins, les intérieurs, les extérieurs, et à l’horizon le volcan à moitié effondré de Bora Bora s’effondre tout à fait.

 

 

Pendant que les raies mantas dans le chenal entre Raiatea et Taha’a tournent autour du corail, tournent et volent, les enfants observent dans le bleu turquoise sous le bateau, ,deux Bernard l’Hermite qui traînent leur grosses coquilles au fond de l’eau et laissent leurs traces dans le sable blanc, et nous voilà Bernard-l’Hermite, Sisyphe de l’océan, traînant notre coquille, notre caracol, et voguant, voguant…

 

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Bora Bora, « île de lumière »

Je mets à mon doigt la bague de Bora Bora et l’alliance est consommée , entre le volcan et les motus, on navigue dans le lagon, on pourrait dire on navigue dans le turquoise tellement la couleur est uniforme, un fond de sable blanc de 1m50, un soleil d’aplomb, du vent, le voilier file et nous le laissons filer sans bride, dans le pur plaisir de le sentir filer, une raie léopard s’enfuit à notre passage, tache noire que l’on suit, est ce une ombre, l’ombre de la raie que l’on suit, ou suit-on la raie elle-même ? est ce Bora Bora, dont le seul nom est collectivement évocateur de rêve , ou est ce bien l’île que nous voyions ? Peut on encore voir Bora Bora ? Où sommes nous là pour trouver un rêve de Bora Bora ? Pourquoi dire deux fois Bora, comme s’il fallait répéter deux fois son nom comme un souvenir de rêve pour appréhender sa réalité ? L’île est dominée par un volcan, noir, abrupt, et définitif, qui crée l’équilibre avec le lagon bleu, ondulant et mouvant. On comprend pourquoi cette île a fasciné les voyageurs, pour ne citer que Paul Emile Victor, Alain Gerbault et que les gens du monde entier viennent la visiter. Pour cette radicalité, ce graphisme entre ligne verticale et ligne horizontale, entre ce turquoise du lagon et ce noir du volcan ? A chacun son rêve…

Entre les petits îlots aux cocotiers ébouriffés et les collines vertes de l’île, nous naviguons, nous ne choisissons pas, ni avec les uns, ni avec les autres, nous ne faisons que passer, regarder, s’interroger, entre les hôtels de luxe et les maisons ordinaires, nous ne faisons que passer, entre ceux qui sont en vacances et ceux qui travaillent, nous ne faisons que passer, nous sommes entre deux…

 

 

Nous mouillons près du voilier des Biquets. Le sable au fond de l’eau est tellement doux que nous restons en apnée, rien que pour le toucher et avoir l’impression de mettre nos pieds dans des chaussons de princesse. On a rencontré les Biquets au Panama, recroisé à Tahiti à plusieurs reprises et nous les quittons à Bora Bora, avant qu’ils nous rejoignent en Asie ? Qui sait? Ils nous font le cadeau de nous indiquer où se trouvent les Raies Mantas et ce sont cinq belles raies Mantas que nous avons la chance d’observer dans l’eau avec le masque. Grâce de papillons géants, ombres fantastiques, une raie fonce vers nous, la gueule ouverte, les branchies apparentes, une autre tourbillonne à la verticale, une autre nous regarde de ses yeux décalés, et « je ne sais pas quel est le plus étonné des deux » ? Une autre s’éloigne, dans l’eau trouble, battant des nageoires, volant, et comme dans un film ancien, à l’image brouillée, quitte l’écran, image qui s’efface, s’imprime dans la mémoire, invite au songe…

Sur une des collines de Bora Bora, nous avons remarqué une petite porte en bois qui donne directement dans la montagne, oui tout cela est vrai, je l’ai même photographiée, et comme de la bouche des enfants, sort toujours la vérité, les enfants vous le répéteront, il y a cette petite porte en bois qui donne dans la montagne, je ne sais pas si la colline abrite des hobbits ou autres créatures minuscules, il nous faudra un autre voyage pour ouvrir la porte…

 

 

Dire la réalité de ce voyage me dépasse, je me sens désarmée et impuissante, tellement de choses vues et de différence entre les mots et la réalité et pourtant il lui aura suffit de tremper la madeleine dans du thé pour que ressurgisse la sensation et par les mots retrouver le temps qui s’était enfui.

Le voyage se fait de l’extérieur du bateau et de l’intérieur du bateau, comme si à l’intérieur même du bateau il y avait à nouveau un monde à explorer, des bibliothèques à relire, à découvrir, bien souvent, je m’installe dans les cabines des enfants et j’explore leur bibliothèque, c’est tout ce temps perdu qui nous aura manqué ces dernières années, j’ai effacé tous mes rendez vous, pour retrouver une page blanche, à écrire.

Huahine… deux

C’est un samedi, en plein mois de juillet que l’ école du bateau a commencé. A la demande des enfants qui la veille m’ont pressé de commencer la classe, nous donnons nos premiers cours de français et de mathématiques, les enfants m’appellent maîtresse…

 

Huahine au bord de l’eau : on retrouve la petite place du village qui longe la baie, la buvette chez Guinette, la Halle où se sont déroulées les cérémonies funéraires de Henri Hiro et où maintenant campent les buveurs de Hinano, les pêcheurs qui ramènent leur prises, deux gros thons jaunes « balaise » commente un des pêcheurs, une dorade coryphène, un thazard, les vendeurs de fruits et légumes, le petit chemin pour aller à la plage, entravé par une vahine bien corpulente, la soixantaine, allongée sur son pareo, topless, et ficelle dans les fesses, les enfants qui jouent sur la plage, la bière dans les verres amenés sur la plage, les cerfs volants blancs qui flottent dans le ciel, le supermarché Superfare, point orgiaque de la consommation à Huahine, la douche en plein air au port, la course de vaa’a, le verre que l’on prend dans le bar qui n’est ni la casa bianca ni avec les amis…

 

Huahine-trop- de-vent, des rafales de 30 nœuds au mouillage, la frite et un saladier qui s’envolent, on a une nuit pour imaginer la chaîne de l’ancre se tordant dans le corail, ça suffit, il est 14h, on change de mouillage, direction le sud de l’île, nous longeons les montagnes de l’île, nous passons devant l’écrin vert de la plage de Ana iti, mais le fond étant jonché de corail, à 7 m, aucune bouée d’amarrage n’étant libre nous poursuivons jusqu’à la baie de Parea. 10 bateaux au mouillage, 10 mètres de fond sans connaître la nature du fond (corail, sable ?), advienne que pourra, nous jetons l’ancre, et allons nous baigner à la plage. Autour du ponton de l’hôtel, les poissons stagnent, Pierre a un lumbago qui ne veut pas passer.

 

 

De retour vers Fare, nous longeons à nouveau la plage de Ana iti, le mouillage est libre de tous bateaux, nous prenons une bouée. En annexe, nous allons au fond de la baie, nous laissons l annexe près de la maison de Terii, un vieil homme nous accueille, nous lui expliquons qu’il y a 8 ans, nous étions déjà venus dans cette partie de Huahine, et avions habité pendant deux mois la petite maison de Daniel, nous avions par la suite rendu visite à plusieurs reprises à la sœur de Pierre et à sa famille qui avait loué la maison de Daniel pendant un an ; la route a été goudronnée, Doris a quitté sa maison et ses plantations de vanille, les pit-bulls  ne sont plus là, mais les arbres, bananiers, papayers, arbres à pain, manguiers, toute une présence végétale est là c’est cette permanence végétale que nous pouvons montrer à nos enfants, avec la mer entre les deux îles Huahine iti et Huahine Nui, qui glisse un bras dans le végétal et crée le passage ; Elanore a fait ses premiers pas dans la petite maison, maintenant avec ses deux sœurs, elles courent sur la route, dans l’ombrage des arbres.

 

 

 

Sur la plage de Ana iti, Siki l’inquiétant, est toujours là, il est le gardien autoproclamé de la plage, sa pirogue un peu rafistolée est toujours là, sa petite cabane dans laquelle il expose ses colliers toujours là, et lorsque nous allons vers lui, bien sûr qu’il se souvient de moi, son obsession première étant les femmes, il nous raconte les femmes qui sont passées ici, il nous raconte celui qui est devenu aveugle, il nous raconte les tempêtes humaines de la plage…il nous ramène de la forêt trois belles papayes, puis s’en va en pirogue sur l’autre rive, récupérer de l’argent qu’on lui doit, me dit il. Un homme aborde notre bateau, il est venu en pirogue, et même muet, il arrive à se faire comprendre, il habite de l’autre côté de l’île, à Tefareri, il nous invite à venir voir sa plantation de cocotiers. Nous laissons passer l’invitation, un autre voyage nous attend, et nous remontons vers Fare.

 

C’est l’imprévu, l’inattendu, la panne, le dessalinisateur ne fonctionne plus, nous voilà contraints de revenir à Moorea, où se trouve le réparateur, Gilles évidemment nous faisons un détour par Tahiti, le temps de boire quelques coups avec nos copains de la marina, tous étonnés de nous revoir là, c’est vraiment une aubaine, et loin de nous obliger, cette escale imprévue nous ravit; nous ne faisons pas à nouveau un pot de départ, et même Arnaud part avant nous (en avion et en Norvege!), le voyage commence bien, avec ses calendriers chevauchés, ses dates bouleversées, ses allers retours, ses adieux bonjours, et avec la certitude que Tahiti ne se quitte pas, que cette île est toujours à notre portée…

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